mercredi 3 mars 2010

"Peut-on appeler "écrire" n’importe quelle tentative de représentation d’une ébauche de pensée..."

Je ne m’attends pas à être lue. Je ne le suis que très peu d’ailleurs. Question d’habitude plutôt qu’une immodeste volonté de figurer aux bancs des poètes maudits. Je ne suis d’ailleurs pas poète. Tout juste nouvelliste intermittente. Mais les nouvelles ça n’est guère vendeur. Il faut de la logorrhée ! De la chiasse écrite ! Une débauche de pages et de points virgule pour entrer au panthéon grouillant des feuilletés et des diffusés. Ce n’est pas mon cas. Pas tout à fait. Je privilégie la frugalité narrative et le maximalisme lexical. Ce qui peut sembler être une contradiction en soi. J’aime beaucoup la contradiction. Ce qui est une banalité. Et l’absurde. Autre poncif.

Mon enfance s’est partagée entre deux sentences… « Lorsqu’on les ébranle, les barils vides font le plus de bruit. » Et « Le chemin qui mène vers le cœur d’un homme est forcément tortueux et passe obligatoirement par son estomac. » De ce premier, j’ai appris les bienfaits du silence. Du second m’est venu une affection invétérée pour la pâtisserie. Pas pour y cueillir un mari. D'ailleurs je me suis retrouvée marida à 22 ans pour escamoter le présage funeste du dicton.

Mon silence est souvent mal interprété. Certains le trouvent hostile. D’autres y voient une invitation à venir m’irriter le récepteur cochléaire… « la branle régulière de la périlymphe déforme le canal cochléaire et fait vibrer les fibres élastiques de la membrane basilaire. La vibration d'un groupe de fibres élastiques de la membrane basilaire excite le segment de l'organe de Corti situé à son contact. Il en résulte un influx nerveux »… se ressasser la magie muette de son anatomie évite souvent le désagrément d’une conversation fade.

On n’aime pas non plus les mots que j’utilise. Ayant céder à l’impulsion normale mais somme toute idiote de soumettre mon premier recueil de nouvelles à un éditeur je fus gratifié par la bonté de son herméneutique littéraire… une débauche de mots trop compliqués pour être compris. J’ai vite épuisé les maisons « indépendantes, nouvelles et différentes » et celles qui l’étaient moins. Il ne restait plus qu’à remballé mon ouvrage dans un classeur poussiéreux où d’autres avortons plus ou moins achevés viennent le rejoindre de temps à autre. Je ne méprise pas ma production. Je me suis habituée à la concevoir pour moi et un happy few non-stendhalien qui inclut bien sûr ma mère… classique comme cliché non ? On ne cesse jamais de vouloir émouvoir ses géniteurs.

Je ne m’attends donc pas à être lue. Pourquoi ce blog alors ? Est-ce que je dériverais moi aussi vers un exhibitionnisme nombriliste ? Me livrerais-je en pâture frappée d’un frais masochisme ? Ma vacuité existentielle pesée analogiquement et répercutée numériquement a-t-elle elle aussi droit de cité ? Oui. Et non. Et peut-être. Et pourquoi pas.

Mes dessins étaient plus naïfs à vrai dire. Je ne cherche qu’un écrin capable de contenir la représentation de ce que je peux et de ce que j’essaie de faire. Une pâle copie de l’originelle. Une reproduction qui prend le dessus. C’est une façon d’exister dans un monde de duplicata. Opposer sa mimésis à celle d’un autre. La possibilité de l’intussusception est, elle aussi, plausible. Qui dira ce qui est vrai et ce qui est premier ? Autant une parodie que le néant ! En attendant autre chose…

4 commentaires:

  1. persienne persienne persienne
    ah, qu'il est dur de rester simple dans l'écriture..

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  2. Aragon, bof! Moi je préfère Queneau.
    Les mots il suffit qu'on les aime...

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  3. Aragon ? J'aurais dit Prévert..

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  4. "Persiennes" dans, "Le mouvement perpétuel" d'Aragon publié chez Gallimard en 1926 ou plus récemment en poche (2007).

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