dimanche 9 avril 2017

Rigueur Ricaine



Silence radio côté couture depuis un moment mais je ne chôme pas pour autant. Mon temps a été accaparé par la confection d'un modèle Ralph Rucci (Vogue American Designer 1404). Pas question d'utiliser de la microfibre ou du thermocollant synthétiques : la robe ajustée et évasée a été faite dans un satin cuir en soie vintage Lanvin, doublée de pongé de soie, surpiquée au fil Gobelins d'Au ver à soie et l'ourlet, entoilée d'une fine bourre traditionelle américaine en coton bio. Le tissu est somptueux, charnu et tient bien sa forme. Le satin, joue avec la lumière à sa guise. Les multiples surpiqûres de l'ourlet et la légèreté de la bourre assurent l'évasement sans raideur du bas de la jupe.


Le designer américain, Ralph Rucci n'est pas vraiment très connu de tous bien qu'il ait réussi l'exploit d'être le deuxième américain seulement, après Mainbocher soixante ans avant lui, à être invité à montrer ses collections à Paris par la Chambre syndicale de la haute couture. Peintre et diplômé en philo de Temple University, Rucci se forme chez Halston ainsi que sous la tutelle d'un modéliste de chez Balenciaga. Galanos et lui se vouent un culte mutuel. Ses inspirations sont multiples - Cy Twombly, Francis Bacon, Louise Nevelson, le symbolisme japonais. Ses robes se trouvent, entre autres, dans les collections du Victoria and Albert Museum à Londres, du DeYoung à San Francisco, de l'Institut du costume du Metropolitan Museum of Art à New York, L'exactitude parfois austère, la perfection de la construction, le détail poussé jusqu'au vice mais jamais ostentatoire et souvent visible seulement de près, l'hyper-esthétisation, et la maîtrise totale du métier, évidente dans ses créations, le mettent dans une catégorie à part dans le paysage de la mode américaine éprise de confort négligé.


L'obsession quasi-constante de Rucci avec la coupe et les découpes et les lignes de couture se retrouve ici joliment illustrée dans cette robe issue de la collection de prêt-à-porter printemps 2013. Elle a été photographiée dans le quartier historique d'Inglewood à Calgary, devant une ancienne pension pour chevaux aujourd'hui centenaire, connue localement sous le sobriquet, "la grange blanche" pour la distinguer d'une consoeur de couleur rouge à quelques encâblures plus loin. Un rare example de grange avec un toit à deux pentes à avoir survécu aux boules de démolition et à l'avidité des promoteurs immobiliers. Une bonne raison de faire la fête !



Et si vous vous demandez si j'ai un crustacé sur la tête, la réponse est oui ! La crevette en question est l'oeuvre de Tami Bar-Lev, une modiste de Tel Aviv aux créations déicieusement saugrenues et fantasques. Sandales Santoni Rose Collection.